Octobre 2007. Rayana Sadoulaeva avec Elisa et Magamed, deux jeunes danseurs Tchétchènes mutilés par les mines, honoraient de leur présence les Rencontres Internationales Cinéma Vérité et illuminaient les soirées à Monaco et Paris avec leurs sourires, leur grâce et leurs danses devant un public conquis.
Rayana recevait un hommage du Fonds Cinéma Vérité, en soutien à ses innombrables actions pour l’enfance et les deux jeunes danseurs rencontraient en privé Sharon Stone qui leur témoignait de son admiration.
La journaliste-réalisatrice Mylène Sauloy autrice, entre autres, du film documentaire « Danse avec les Ruines » (2002) était présente et accompagnait son amie Rayana dans son voyage en France.
Aujourd’hui Cinéma Vérité et toutes les personnalités qui nous soutiennent sont solidaires dans le deuil aux côtés des associations de défense des droits de l’Enfance et de l’Homme.
Grâce à Mylène nous avons connu Rayana son association et tous ses enfants qui aujourd’hui sont orphelins de cette mère qui les a tant aimés et aidés.
Extrait du reportage de Mylène Sauloy « Tchétchénie enfance brisée » (2006) :
Grozny, la ville la plus bombardée depuis la Seconde guerre mondiale. Ici, les hommes se reconstruisent moins vite que la ville… Deux guerres successives ont laissé 3 800 mutilés à vie - dont près d’un millier d’enfants – victimes non reconnues d’une guerre qui tait son nom.
Rayana, la fondatrice du centre « Spasiom Pakalenie », - soutenu par la Commission Européenne, Handicap International et l’Unicef - accueille chaque jour une soixantaine d’enfants et de jeunes. La plupart ont sauté sur des mines antipersonnel posées par l’armée russe. D’autres ont été gravement blessés ou traumatisés sous les bombardements.
Rayana Sadoulaeva et son équipe tiennent par les épaules – ils sont les seuls à le faire ainsi – ces jeunes fracassés par la guerre. « Arrêtons, dit Rayana, il reste si peu de Tchétchènes ! » Un peu plus d’un million. Avec son association dont le nom évoque autant le cri d’alarme que l’élan salvateur : Spasiom Pakalenie, « Sauvons la génération ! »
Elle rit. « C’est Dieu qui m’a mise sur cette route. Et tel que c’est parti, ça risque de durer toute la vie ! J’aime bien aider les autres. » Elle a cette qualité d’extrême attention à l’autre, mine de rien, tout en riant, tout en bavardant.
Elle se bat chaque jour pour qu’ils vivent. Avec quarante tonnes de bombes, roquettes ou mines non explosées, la Tchétchénie est aujourd’hui, proportionnellement au nombre d’habitants, le pays le plus miné au monde. « Il y a des mines partout, de toutes sortes, dit-elle, les fameuses mines papillon jetées d’hélicoptère et même des briquets, des stylos. Les Russes ont miné ; les boeviki (combattants tchétchènes) à leur tour. Le plus souvent, les accidents se produisent en allant chercher du bois à la campagne – il n’y a plus de gaz pour se chauffer – ou en allant récupérer des briques et du métal dans les décombres pour les revendre. Ce sont des jeunes surtout qui sautent, des garçons, chargés des corvées. »
Auprès de Rayana, ils viennent chercher une aide médicale et psychologique. Une famille aussi. Entourée d’une équipe d’éducateurs tout aussi motivée qu’elle, Rayana suscite des miracles. De jeunes adultes, amputés d’un bras ou des deux jambes, s’entraînent dur pour participer à des championnats de bras de fer, de danse et rêvent des Jeux paralympiques.
Consciente que la « reconstruction » est loin de se limiter aux besoins physiologiques, Rayana est à l’origine de la formation d’une petite troupe de théâtre composée d’enfants, qui joue, de classe en classe, une pièce sur le danger des mines. Récemment, une ONG allemande est venue à Grozny avec une équipe de chirurgiens pour opérer 153 enfants victimes des mines antipersonnel. Encore un petit miracle organisé par Rayana…
Cinéma Vérité Paris, Août 2009 |